La fabrique des récits : mémoire individuelle et collective, suite

Très belle découverte des oeuvres de Sally Gabori à la Fondation Cartier pour l’art contemporain

En complément d’un article que j’ai mis à jour récemment, « Mémoire individuelle, mémoire collective », voici les quelques citations que j’ai tirées d’ouvrages de Boris Cyrulnik qui reste ma référence pour les notions d’identité, de résilience et de mémoire. Je continue à tracer mon sillon sur ces notions, au fil de mes découvertes. Au plaisir d’échanger avec mes lecteurs/lectrices, n’hésitez pas à laisser vos commentaires en bas de l’article.

Boris Cyrulnik, dans Des âmes et des saisons ; Psycho-écologie, Odile Jacob, 2021 que je recommande : « Le sens qu’on attribue aux événements vient de la structure du contexte autant que de l’histoire. Ce qui revient à dire que le regard que l’on porte sur notre passé dépend des récits que notre culture compose. » « C’est à la lumière du présent qu’on éclaire le passé. Dans nos récits individuels, quand on se sent bien, notre mémoire va intentionnellement chercher dans le passé les faits qui pourraient expliquer notre bien-être. Et quand on se sent mal, notre mémoire va chercher d’autres faits, tout aussi réels, pour expliquer notre mal-être. Les récits sont opposés et pourtant ne sont pas des mensonges, puisqu’on a sélectionné et interprété différemment des segments de réalité ». (page 32)

« Il y a donc une mémoire individuelle tracée dans la matière cérébrale par les pressions du milieu, et il y a aussi une mémoire hyperconsciente, une histoire de soi que l’on croit intime alors qu’elle provient des mots issus de nos relations. Est-ce à dire qu’une grande partie de nos souvenirs intimes sont imprégnés en nous par les récits collectifs ? Pour voir le monde et le comprendre, nous le réduisons à quelques informations mises en lumière par les récits qui nous entourent. (page 36)

« Nous croyons raisonner raisonner par nous-mêmes, alors que nous ne faisons qu’incorporer dans notre mémoire les récitations du groupe, ses croyances et ses préjugés. Les histoires partagées, les opinions acquises en toute inconscience créent un sentiment d’appartenance auquel on adhère avec bonheur puisqu’il nous solidarise. » (page 57)

« L’écologie verbale : un ensemble de récits familiaux et culturels qui structurent un environnement invisible et déclenchent d’intenses sentiments ». (page 94)

« La parole agit aussi sur notre mémoire et peut modifier la représentation de notre passé. Le récit de soi n’est pas le retour du passé, c’est la représentation du passé à partir d’aujourd’hui. La mémoire évolue, comme toute mémoire saine, parce que l’existence a ajouté d’autres expériences de vie qui ont modifié la représentation du passé. » (page 287)

« C’est bien l’élaboration mentale, l’effort d’agencer les représentations pour comprendre un événement et en faire un récit, le lent travail de l’esprit qui entraînent le sujet à ressentir les choses différemment ». (page 290)

Et pour approfondir : Mémoire et traumatisme : l’individu et la fabrique des grands récits. Boris Cyrulnik, entretien avec Denis Peschanski. Ina Editions, 2012.

Série de podcats « A voix nue » sur France culture : « Les mots font saigner la mémoire« 

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