Mobilité et identité

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Sujet d’actualité, la mobilité est une notion qui me taraude depuis un moment. Ne voyageant plus à l’étranger depuis quelques années, je m’interroge régulièrement sur l’effet que cela peut avoir sur ma curiosité, mon ouverture au monde, ma tolérance à la différence … Et je ressens aussi fortement cette injonction sociale, implicite, au mouvement. A la lecture de cet article de Télérama (1), dont je vous partage quelques extraits – qui font débat, et c’est tant mieux – je me rends compte que la perception de la mobilité a évolué, et qu’elle est liée directement aussi à l’identité, socle de ma pratique d’accompagnante.

Avant la révolution industrielle, le voyage, par la terre ou par les mers, est un art mondain, un privilège de nantis. Le chemin de fer permet, le premier, aux bénéficiaires des congés payés de découvrir de nouveaux horizons. En 1936, six cent mille Français font grimper leur famille dans des wagons direction les dunes ou les champs. Jusqu’aux années 50, on vit dans la proximité piétonne du domicile, en donnant à la rigueur un coup de pédale ou en prenant la navette d’entreprise. L’automobile est une marque de raffinement réservée aux bourgeois.

La mobilité commence à se construire comme un outil d’émancipation. Circuler, droit fondamental de la Déclaration universelle des droits de l’humain, devient un moyen de ses libérer individuellement. Partir, c’est s’arracher à un ancrage, une appartenance. C’est franchir les frontières géographiques et s’affranchir des assignations identitaires. Le destin se dirige à coups de volant ! La voiture est vendue comme un moyen d’accéder au monde et à l’indépendance, pour monsieur comme pour madame.

“La mobilité sans effort constitue une espèce de bonheur, de suspense de l’existence et d’irresponsabilité”, observe le philosophe Jean Baudrillard en 1967.

La mobilité de loisirs devient une norme sociale, le tourisme une pratique culturelle : entre 1951 et 1989, le taux de départ en vacances passe de 31 % (soit 10 millions de Français) à 60,7 % (soit 33 millions de Français).

Ne pas rester chez soi, c’est exister aux yeux d’une société qui célèbre l’activité constante. Idéalisée, valorisée elle-même, la mobilité n’est plus seulement un moyen. Elle devient une fin en soi. Et l’immobilité, une faute.

Car la promesse d’émancipation s’est transformée en injonction à bouger. La mobilité est désormais une contrainte, voire une obligation, pour une large partie de la population. Les innovations techniques, combinées à la révolution numérique, ont bouleversé le quotidien, façonnant de nouveaux modes de vie : celui des cadres toujours entre deux avions, des couples séparés par leur emploi se retrouvant en fin de semaine, des familles vivant à la campagne et travaillant en ville, des expatriés qui retournent régulièrement dans leur pays d’origine…

Cette hypermobilité a un coût : le budget transports a dépassé le budget logement, la pollution de l’air fait 48 000 morts par an, les tensions s’avivent dans les familles à cause de la fatigue, le stress des embouteillages altère le bien-être, les effets sont dévastateurs sur les territoires entre des villes surpeuplées et des campagnes délaissées,  la biodiversité est mise en danger par l’urbanisation non contrôlée …

Etre immobile, c’est s’exclure socialement, alors que les services publics poursuivent depuis des décennies leur cure d’amaigrissement à l’échelle du territoire : de 1980 à 2013, l’Insee a observé une baisse de 24 % de nombre d’écoles, de 31 % pour les centres des impôts, de 36 % pour les bureaux de poste ou encore de 41 % pour les maternités. Ne pas pouvoir se déplacer restreint jusqu’aux droits fondamentaux : s’instruire, se soigner, se cultiver, se nourrir…

Après nous avoir libéré, la mobilité tend à nous enfermer. Constante, irrépressible, aliénante, elle nous disperse. Nous éparpille.

“La mobilité ne libère pas l’individu, amplifie le sociologue Eric Le Breton (2). Elle le scinde, le partitionne, le brise et l’épuise. Elle le projette dans des territoires où, le privant de ses racines et de ses liens, elle le prive de tout, y compris de lui-même.”

La mobilité nous oblige à nous adapter constamment, à sans cesse trouver de nouveaux repères. Comment dans ces conditions trouver une place stable dans ce monde en fuite ? Pouvoir se déplacer fut un luxe. Aujourd’hui, le luxe, c’est de ne pas y être contraint.

Depuis cet article rédigé en 2019, est paru dans la collection TRACTS de Gallimard cet opus signé Cynthia Fleury et Antoine Fenoglio, “Ce qui ne peut être volé“, ou Charte du Verstohlen (2022) qui complète notre éclairage. Dans les 10 points de cette charte, le premier est relatif à la perspective, accéder à une vue : “Une chambre avec vue désigne parfaitement ce qu’une ressource matérielle peut devenir, à savoir une ressource existentielle. Accéder à une vue, dans l’espace privé ou l’espace public, est une nécessité journalière. Voir l’horizon, la beauté, la lumière naturelle nous inspire, nous soutient, et sollicite notre prendre soin en retour. La perspective a le mérite d’être autant un mode de représentation créative de l’espace et de ce qu’il contient, qu’une notion qui permet d’embrasser ces différents éléments que sont l’horizon, la vue, la lumière, l’espace libre devant soi. Un paysage, urbain, rural, maritime, sauvage. Les mondes urbains et ruraux ne peuvent se transformer en prisons où tout édifice arrête le regard : murs et bêtise ont ceci de commun qu’ils tuent les perspectives” (page 5).

(1) Télérama 3608 du 06/03/2019 écrit par Romain Jeanticou, Bouger nous empêche t-il d’avancer ?

(2) Mobilité, la fin d’un rêve ? Eric Le Breton, ed. Apogée

Accompagner les entrepreneurs

Cette semaine, un coach et chef d’entreprise m’a dit : “ta singularité, c’est ton accompagnement des entrepreneur.es”. Il a raison. Une fois n’est pas coutume, je vais donc vous présenter comment j’accompagne les entrepreneur.es, avec quelques réalisations et de belles rencontres à la clé.

L’étape la plus fréquente est celle de l’idée : elle a émergé, elle est là, il y a un concept, à travailler, et souvent le souhait de mieux expliquer un positionnement marketing, d’adresser un public, et de mettre en mots et en images tout cela.

La demande d’accompagnement se situe donc plutôt en amont, avant le business plan, parfois même avant l’étude de marché.

Nous sommes dans une démarche de projet, à concrétiser avec l’appui d’un regard extérieur, neutre, parfois challenging et confrontant, et toujours constructif et bienveillant.

Quelques exemples d’accompagnement individuel effectués ces derniers mois :

  • Une consultante, avec plusieurs offres et plusieurs publics potentiels, me demande de l’aider à réaliser son profil LinkedIn pour mieux vendre son approche. Nous sommes revenues ensemble sur son offre elle-même, en en recherchant la cohérence, la logique, en nous appuyant sur ses expériences passées qui légitiment son expertise et sur ce qui la motive pour demain. Les mots sont ensuite venus tout seuls. Je lui ai aussi conseillé un photographe pour son profil LinkedIn.
  • Une journaliste, pressentant que son histoire personnelle orientait fortement son projet de création de site Internet, future vitrine de son offre, et aussi moyen d’expression originale de son identité. Le début de l’accompagnement a consisté à poser les jalons de cette identité pour démêler ce qui était de l’ordre de l’intime et de l’histoire familiale, et en quoi ces fondamentaux pouvaient légitimer et consolider son projet professionnel, jusqu’à la construction de l’arborescence de son site, en cours.
  • Après un licenciement, une future consultante souhaite développer une offre de conseil, tout en voulant prendre son temps pour vivre cette transition professionnelle dans les meilleures conditions. Pas simple de changer de statut, même si la continuité en matière d’expertise professionnelle constituait un socle sur lequel s’appuyer. Et surprise, assez vite, émerge un autre projet professionnel, inattendu. La suite de l’accompagnement a permis d’approfondir les deux voies, tout en réfléchissant aux passerelles possibles entre les deux.
  • Une artiste, au parcours de vie hors norme, a l’intuition que ses compétences artistiques peuvent être proposées aux entreprises, sous forme d’ateliers de développement personnel et professionnel. Comment présenter son offre ? Comment articuler parcours de vie et projet professionnel en entreprise ? L’accompagnement a permis de déverrouiller certains blocages pour oser. Avec de nouvelles idées qui ont émergé, dans un lien étroit entre histoire de vie et terrain de jeu professionnel.

En matière d’accompagnement individuel, je m’appuie sur deux approches :

  • Le référentiel en histoires de vie, héritées de la sociologie clinique, que j’ai largement présentée sur mon site.
  • L’accompagnement par les rêves avec Shynleï, où les personnes travaillent sur leurs désirs et motivations, tout en définissant un plan d’actions concret.

Le collectif a sa part aussi, et pour ce faire, j’ai créé un atelier qui s’intitule “Comment exprimer son identité professionnelle“, ce que je présente ici.

L’objectif : exprimer de façon authentique et incarnée son identité professionnelle. Être aligné.e entre soi et son projet.

Voici quelques retours de personnes qui y ont participé et qui expriment leurs ressentis suite à cet atelier de deux journées.

En collectif, je vais développer cette année un accompagnement de type codéveloppement à l’intention d’intrapreneurs en entreprise.

Les intrapreneurs mettent en oeuvre sur du temps dédié, en restant dans leur entreprise, des projets, le plus souvent innovants, mais pas que, au service de leur entreprise, que ce soit pour les clients et / ou les collaborateurs (la symétrie des attentions).

Rapide définition du codéveloppement : “Le codéveloppement professionnel est une approche de formation qui mise sur le groupe et sur les interactions entre les participants pour favoriser l’atteinte de l’objectif fondamental : améliorer sa pratique professionnelle.”

L’objectif ici est de permettre aux intrapreneurs de se développer ensemble et de s’entraider dans la réalisation de leurs projets.

Comme vous l’aurez remarqué, j’accompagne en majorité des femmes. L’entreprenariat féminin est en effet une cause qui me tient à coeur.

Vous pouvez consulter ce dossier monté par Marie Claire, avec un certain nombre d’idées reçues sur les femmes qui entreprennent, auquel j’ai contribué. A écouter sur Marie Claire également, une série de 6 podcasts La belle audace avec des femmes qui expliquent finement à quel moment et dans quelles circonstances elles ont décidé de se lancer.

J’ai pu rencontrer des femmes formidables, qui oeuvrent chaque jour pour convaincre et soutenir les entrepreneures, comme par exemple :

  • Frédérique Clavel et Sophie Meurisse, qui ont corédigé un livre Entrepreneuse, pourquoi pas vous ? (Eyrolles). Les écouter ici.
  • Viviane de Beaufort, auteure de l’ouvrage : Génération #startuppeuse ou la nouvelle ère aux Editions Eyrolles.
  • Sophie Courtin-Bernardo et Dominique Descamps, de L-Start, qui ont corédigé Femmes entrepreneures, se lancer et réussir, aux Editions Lextenso, ouvrage pratique pour créer son entreprise, pour lequel j’ai été interrogée.
  • Catherine Thibaux, qui a publié un livre pratique et utile sur le mentoring, particulièrement adapté aux femmes qui entreprennent.

Et  j’ai eu la chance de faire la connaissance de femmes qui se sont lancées, témoignent et partagent leur vécu avec générosité et authenticité, qu’elles en soient remerciées (liste non exhaustive !) : Mitrane Couppa, Nathalie Lebas-Vautier, Angélique de Rocquigny, Sandra Leblanc-Mesnel, Lara Pawlicz, Françoise Poulain-Bazin, Géraldine Caron.

Vous avez une idée, vous voulez créer une entreprise, vous souhaitez être accompagné.e dans votre projet, vous dirigez un programme d’intraprenariat en entreprise ? Me contacter pour avancer ensemble.