Le bonheur au travail est une notion récente

 

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Selon l’historienne Anne-Sophie Bruno (1), interrogée par le journal La Croix (16 mars 2017) « le bonheur au travail est une notion assez récente ».

Jusqu’aux années 1990, personne ne parlait de bien-être, de satisfaction ou de qualité de vie au travail. Pas même les partenaires sociaux. L’exigence d’épanouissement, dans la vie en général et au travail en particulier, n’existait pas. Il y a trente ou quarante ans, le débat public se focalisait autour de la notion de santé au travail, au sens strict (accident et maladie professionnelle) et dans un second ordre sur les questions de pénibilité.

Il existe des éléments objectifs pour mesurer l’amélioration des conditions de vie au travail, par exemple la baisse des accidents mortels sur les lieux de travail ou l’augmentation de l’espérance de vie. Mais il faut balayer l’idée d’un progrès linéaire depuis les Trente Glorieuses. Les inégalités demeurent fortes, et pas seulement entre ouvriers et cadres. Certains secteurs sont moins organisés et sont restés à l’écart de ces progrès, comme le bâtiment, les travaux publics, la confection ou le nettoyage et la comptabilité, ces deux derniers ayant basculé vers l’intérim. Ce sont d’ailleurs des secteurs qui emploient une main-d’oeuvre très féminisée et beaucoup de jeunes ou d’étrangers.

Le modèle tayloriste produisait de l’ennui sur les chaînes de montage mais aussi de nombreux troubles musculosquelettiques. Si certains secteurs sont restés sur ce modèle – c’est le cas de l’industrie agro-alimentaire par exemple, des ateliers de découpe et d’abattage – d’autres ont largement fait évoluer leur organisation du travail.

Mais dans le même temps, d’autres impératifs sont apparus, en particulier les exigences de zéro défaut et de flux tendu. La pression est devenue plus forte sur des salariés à qui l’on demande d’être polyvalents.

On parle de santé mentale au travail depuis le XIXe siècle, mais cette notion a longtemps été occultée par la pénibilité physique liée au travail industriel. Les syndicats de salariés ont commencé à se saisir de cette question dans les années 1990 et le grand public dans les années 2000, en particulier avec la médiatisation des suicides dans certains grands groupes.

Dans les entreprises, les cadres sont soumis à une pression plus forte sur les résultats à atteindre. Face à ces exigences, ils font preuve d’une demande accrue de participation aux décisions. Mais la qualité de vie au travail est aussi plus fréquemment perçue comme un facteur d’amélioration de la productivité.

Le fait que la santé économique d’une entreprise dépende aussi de la santé de ses salariés est mieux admis (2). Il ne faut pas faire preuve de naïveté, mais c’est un discours tenu de plus en plus souvent par les organisations patronales.

(1) Anne-Sophie Bruno, Maître de conférences en histoire contemporaine à l’Université Paris I – Panthéon Sorbonne.

(2) Les Echos Start, 21 juin 2017 : Classement HappyAtWork : les entreprises où l’on est heureux. Plus de 29 000 personnes dans 4 600 entreprises ont évalué leur entreprise selon six critères (développement professionnel, environnement de travail, management, salaire & reconnaissance, fierté et “fun”). Globalement, les salariés français ont l’air de plus en plus heureux au travail : 52,2 % des salariés interrogés ont une opinion favorable de leur société, un chiffre en nette progression par rapport à l’enquête de l’année dernière (45,4 %). La recette ? “Le bien-être au travail, cela ne veut pas dire enlever tout contrôle, mais mettre en place des situations saines pour l’entreprise… et ses salariés. Il y a trois piliers essentiels : le sens (sentir que son travail a une utilité), la reconnaissance (de son manager ou de ses pairs) et l’espoir (d’évoluer)”, détaille Loïck Roche, directeur de Grenoble Ecole de Management.

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